Frédéric Deborsu : "J'ai écrit ce livre pour permettre de comprendre la monarchie !"
par Kevin Denis
- 24 octobre
Ce mercredi, sujet ô combien brûlant dans Les Chauds Matins ! Suite à la sortie du livre de Frédéric Deborsu, Questions Royales, nous avons décidé de donner la parole à l'auteur. Depuis le week-end dernier, la polémique enfle autour de certaines phrases chocs. Frédéric Deborsu s'en défend et vous explique le pourquoi de ce livre.
Une interview "sur le grill" à réécouter en podcast ! Sachez qu'en bas de page, vous en retrouverez la retranscription exacte.
Interview de Frédéric Deborsu (version texte).
Voici la retranscription de l'interview de Frédéric Deborsu. Merci à Bastien Delécluse (st.) pour son travail !
Nous avons invité dans les Chauds matins Frédéric Deborsu, non pas pour faire de l’audimat comme prétendent certains, mais plutôt pour savoir ce qui se cache derrière ce bouquin. Frédéric Deborsu, est-ce que, compte tenu de la crise annoncée, c’est judicieux de sortir le livre maintenant ?
Alors sur Albert II, juste une parenthèse, quand je parle de sa vie privée, je parle justement du fait qu’il a un peu raté l’éducation de ses enfants. Ce qui était un de ses devoirs importants, puisqu’il a deux choses à faire. Remplir sa mission et faire en sorte que sa succession soit bien assurée. Et là, il y a des lacunes.
Sur le timing, on a postposé la sortie du livre pour ne pas qu’il sorte avant les élections communales et qu’on prête le flan à ça. On est un an et six, sept mois avant les prochaines élections. On a jamais été si loin d’une élection en Belgique où il y en a toujours. Il n’y a jamais de bon timing. Par ailleurs, un livre comme ça sortirait deux, trois, mois avant les élections de juin 2014, j’entends votre remarque. Ici, c’est l’occasion c’est pour la monarchie, la royauté, de se dire qu’ils ont encore du boulot et qu’ils doivent être une monarchie exemplaire pour 2014 et l’arrivée probable des nationalistes flamands de la NVA. Moi je crois que le timing est le moins mauvais dans la mesure où il laisse une grande période à cette famille royale pour se serrer les coudes, pour s’unir. On voit par exemple qu’Astrid, Laurent et Philippe se connaissent à peine, ils ne se côtoient pas. Je crois qu’ils doivent apparaitre comme un team uni pour l’horizon 2014 avec une bannière royale positive et exemplaire.
Une auditrice nous dit « c’est top d’apprendre que ses parents ne t’aiment pas, que son père est homo, que sa grand-mère a la cuisse légère et que son grand-père va mourir. » Mais il n’y a pas que ça.
C’est un peu facile de retirer que ça. Les journalistes me reprochent d’avoir évoqué ces sujets et eux ne reprennent que ça. Il n’y a rien de dit dans le livre, c’est fait avec un peu de pudeur. C’est pas fait avec hypocrisie, j’ai pas écrit les choses telles quelles, c’est fait de manière plus subtil. Pour des enfants s’ils lisent le livre, ça passera au bleu. Maintenant on peut extrapoler comme on veut et le fait que les médias en aient fait des tonnes, a faussé la donne. On dit que ça a servit à la promotion du livre, j’ai jamais demandé ça. Il y a une fuite à la base, orchestrée par un journal dont je suis collaborateur et qui m’a complètement trahi. J’ai été trahi par quelqu’un qui est venu à mon propre mariage, vous allez dire que c’est un peu la monnaie de ma pièce, ok pas de problème ça sert à ma promo. Mais je l’ai pas demandé, j’avais les larmes aux yeux samedi matin d’avoir été trahi par un ami.
Mais c’est quoi le but premier de ton livre ?
Comprendre. On se pose des questions sur la royauté depuis des années, Philippe est remis en question tous les six mois en se demandant s’il est prêt, s’il sera capable. Déjà en 1990, Herman Liebaers, grand chancelier de la cour disait « Hij kant het niet » (il ne pourra pas être Roi). Et ça a continué comme ça tous les ans, on dit Philippe pas capable. Moi je dis le contraire et effectivement c’est écrit dans le livre. Dans le livre, je dis qu’il sera roi et qu’il peut s’en tirer. Mais il doit modifier son entourage, s’entourer des personnes plus modernes. Des diplomates et des militaires c’est bien, mais il faut des personnes qui vivent dans la vraie vie au quotidien, qui connaissent ce dont l’homme de la rue parle et l’aider à le décomplexer complètement. Il doit aussi avoir une conversation avec son père pour parler des blessures du passé pour repartir sur des bases solides et son père doit également le propulser, le mettre en valeur, ce qu’il n’a jamais vraiment fait.
Philippe a toujours été mis de coté. En 1993 par exemple, Philippe habite dans un loft à Laeken et il n’est jamais convié au palais de Laeken où Albert et Paola fêtent le début de leur règne, c’est le renouveau à Laeken. Il y a des cérémonies, c’est beau, c’est éclairé, Philippe voit les invités arriver les uns après les autres et lui, futur Roi, pas du tout associé, mais parqué dans son petit loft bien vieux, bien triste. Ca fait partie des grosses blessures qui sont évoquées dans le livre et ça aussi, il faut le dire.
Une auditrice nous dit que ce qui est dans le livre fait partie de légendes déjà connues.
C’est ce que disaient hier les journalistes lors de la conférence de presse « Tout ça on le savait, mais on ne l’a jamais dit ». On ne sait pas trop pourquoi. C’est comme la fille cachée d’Albert II, tout le monde le savait et personne ne l’a jamais vraiment dit. Attention la révélation de cette fille cachée dans le livre de Mario Daneels en 1999, pas un témoin cité, mais il s’est avéré qu'elle a reconnu peu de temps après. Ici, certaines personnes tentent de nier. Ceci dit, dans son communiqué hier, Philippe de Belgique n’a rien nié.
Leslie : Dans son communiqué, Philippe dit que le plus beau jour de sa vie, c’était le jour de son mariage. Qu’est-ce que vous lui répondriez ?
S’il le dit, c’est qu’il l’a pensé. Il était peut-être content aussi de pouvoir faire plaisir à son père, donc c’est peut-être tout à fait la réalité. Moi j’ai dit que c’était un mariage forcé parce que son père lui avait mis la pression pour épouser une femme. A partir de là, comme il a atteint son but, il devait etre très heureux.
Une ligne dans le livre dit que Philippe n’a pas embrassé Mathilde le jour de son mariage. Effectivement le manque d’amour est évoqué par rapport à sa relation.
On a contacté Stephane Bern qui n’est pas très content. Ca vous fait quoi ?
C’est n’importe quoi, il ne connait même pas la situation en Belgique. Chaque fois qu'on l’interviewe, il ne connait pas la situation belge. Moi je peux vous dire que j’étais aux Jeux Olympiques avec mon grand drapeau belge pour la finale des Borlée dans le stade, j’étais aussi à Belgique-Croatie et franchement je suis supporter des couleurs belges quand elles s’exposent. Quant au côté flamingant, mon frère Christophe est à la base du fait que la RTBF et Bart De Wever ne se sont plus parlés pendant huit mois. Qu’on arrête avec les buts cachés, la volonté de nuire. Il est quand même temps qu’on s’ouvre à des enquêtes un peu pointues sur le sommet de l’Etat. Quand il dit "on ne découvre pas la couronne", je crois entendre un speaker des années 70. On peut quand même enquêter sur celui qui nous gouvernera plus tard. C’est quand même légitime. On peut dire où est la limite, mais il faut voir comment ça été écrit. Ça été écrit de façon sobre, clean, il n’y a pas de détails scabreux. Et tout ce qui est écrit sert à faire comprendre la personnalité du Prince hériter qui est troublé, qui a du mal dans les médias, qui a du mal à s’exprimer, qui a du mal avec son père. On comprend mieux pourquoi il en est arrivé là, c’est essentiel qu’on dise à un moment il est en difficulté pour telle ou telle raison. Maintenant qu’ils se parlent et qu’ils progressent puisqu’en 2014 ils seront mis en difficulté. Alors autant que maintenant ils se parlent, il est encore temps.
Qu’est-ce qui nous garantit que vous dites la vérité ?
Quand on parle de la famille royale et qu’on fait des enquêtes, on ne parle jamais à visage découvert. Tous les journaux font pareil depuis des années, ceux-là même qui donnent des leçons. Il n’ y a plus moyen de faire autrement. C’est un style particulier. Il faut effectivement avoir recours à des témoins, dont certains parlent à visage découvert et puis qui demandent pour ne plus être à visage découvert. C’est finalement ça qui est inquiétant, pourquoi les gens ont peur ? Pourquoi ils se cachent ? Et ça quelque part, ça m’inquiète.
Selon une auditrice, ce matin tu disais « Tous les témoignages sont anonymes, donc les miens aussi ».
C’est pour expliquer que ce n’est pas possible de faire mieux parce qu’aujourd’hui tout le monde a peur de parler de la famille royale à visage découvert. Est-ce que dans ce cas-là on s’abstient ou pas, on peut se poser la question. Je connais mes sources et si je mettais mes noms, ce serait une bombe x10. Mais j’ai protégé mes sources, il en va de la déontologie. En fait je crois que je n’aurais pas dû être déontologique et balancer toutes mes sources chaque fois. L’opinion publique aurait été bien plus positive, mais je n’aurais plus pu me regarder dans la glace.
Est-ce que tu regrettes des choses que tu as dites dans le livre ?
C’est trop tôt. Mais j’aurais dû peut-être mettre plus de témoignages dans certains chapitres, pour montrer l’évidence. Mais certaines fois, j’ai voulu être plus sobre pour qu’un chapitre ne prenne pas trop d’importance. On dit que je n’en dis pas assez, mais c’était le but, pour ne pas en remettre des couches. C’était pas le but du livre, à la base, de parler des aspects éventuellement sexuels. Je voulais être sobre.
La perche est lancée, mais pas assumée ?
Totalement assumée ! J’ai des témoins en béton derrière, simplement je ne voulais pas avoir trop de lignes sur des sujets délicats. Et c’est exactement le contraire qui s’est passé, la presse a interprété le livre très rapidement et n’en a pas lu les 4/5ème. C’est un peu vache.
C’est la fuite qui a foutu le bordel en fait ?
Clairement, ça a desservi totalement le livre. C’est pour moi une catastrophe et ça a desservi mon image.
Tu n’as pas peur pour ton avenir professionnel ?
Pas de souci, je suis employé de la RTBF et j’en suis fier. C’est une chaine que j’adore, j’adore mon boulot. J’y retourne après la promo avec grand plaisir. Je m’attends à faire des sujets passionnants, comme tous les jours au journal télévisé de la meilleure chaine francophone.