2015年5月24日星期日

La fortune tombée du ciel

2015-05-23

La fortune tombée du ciel © Arnaud Finistre La fortune tombée du ciel

Dans le désert marocain, c’est devenu une véritable chasse au trésor. Ceux qui arpentent les dunes à la recherche de météorites sont de plus en plus nombreux. Une quête extraterrestre qui peut rapporter gros.

Sur le marché confidentiel de la météorite, Mohamed Aid est un incontournable. Malgré son allure simple, son attitude modeste, ce marchand reconnu repose sur un petit trésor. Sa plus belle pépite se nomme « Black Beauty » : un caillou noir comme du charbon qu’il a revendu quelque 220 000 euros. Trouvé en 2011 dans le désert marocain, dans une zone appelée Rabt Sbayta, cet éclat de Mars est la météorite la plus chère au monde. Elle est issue de la surface de la planète, et sa valeur scientifique est inestimable. Son prix d’acquisition continue d’ailleurs de grimper : en novembre 2014, une trentaine de grammes a atteint les 70 000 euros aux enchères chez Christie’s, la célèbre maison de ventes. Lorsque Mohamed Aid évoque la pierre de sa vie, en étalant ses dernières acquisitions (diogénite, pallasite, lunaire), sur la table de son salon, ses yeux sombres scintillent : « Black Beauty, confie-t-il, c’est de loin ma plus heureuse trouvaille. »

Nous sommes dans le sud du Maroc, aux portes du grand Sahara. Dans cette zone de transit, tout s’échange, tout se vend. Dès le Moyen Age, les caravanes débarquaient chargées d’or, après des mois de voyage, écrasées sous le soleil saharien. Pourtant, depuis quelques années, une nouvelle ruée vers l’or a pris le relais : une chasse aux météorites qui captive autant les nomades, les scientifiques, les passionnés que les spéculateurs… Pour expliquer cette tendance, un argument de taille : au Maroc, les météorites appartiennent à ceux qui les trouvent et c’est le seul pays de la zone saharienne à tolérer leur vente. Dans les pays frontaliers, Algérie, Tunisie ou Libye, elles reviennent de facto à l’Etat. Leur exportation est interdite et parfois même passible de prison.

La ville d'Erfoud est devenue la plaque tournante du commerce des météorites

A quelques kilomètres des dunes touristiques de Merzouga, à l’extrême est du Maroc, la ville d’Erfoud est devenue la plaque tournante du commerce des météorites. Yahiya est un des nombreux intermédiaires qui en vit, attendant son jour de chance, celui où il tombera sur une pépite de valeur. Pour cela, il achète les pierres aux nomades et les revend à des Marocains ou à des visiteurs de passage. S’ils ne sont pas collectionneurs, ces acquéreurs étrangers iront eux-mêmes les écouler dans des bourses spécialisées et organisées de par le monde : Ensisheim en Alsace, Tucson en Arizona, Munich en Allemagne…

Aujourd’hui, Yahiya vient de recevoir un coup de téléphone d’un de ses contacts. Mohammed, un nomade, aurait déniché une météorite précieuse, a priori une chondrite carbonée, contenant du carbone, comme son nom l’indique. Si la pièce est belle, il pourra la revendre un bon prix. Hormis quelques boutiques pour les touristes, il n’existe pas de point de vente, le réseau est organisé autrement et les négociations se font dans le désert ou chez les particuliers. Petites mains besogneuses, ce sont les nomades qui récoltent le plus souvent sur le terrain. En effet, pour faire paître leurs troupeaux, ils parcourent des kilomètres. « Avec la chaleur, le vent, c’est très difficile de chercher. Pour eux, c’est différent, ils sont nés dans le désert. Ils le connaissent bien », détaille Yahiya.

Nassim le berger a appris à reconnaître les pierres à fort potentiel. © Arnaud Finistre

Dès le lendemain, l’acheteur part en 4 x 4 à la rencontre de Mohammed. D’Erfoud, il emprunte la route qui traverse les casbahs en ruine, d’anciens villages fortifiés, puis la piste sinue à travers la palmeraie, réputée pour ses dattes savoureuses. Finalement, au bout d’une demi-heure, le désert avale l’asphalte et la voiture pénètre un univers rocailleux et aride, hérissé de touffes vertes. Au loin se profilent les sommets enneigés de l’Atlas.

Après une bonne heure de trajet, Yahiya atteint le secteur où sont établis Mohammed et sa famille. Il cherche du réseau téléphonique pour appeler en même temps qu’il scrute l’horizon de son œil habitué. Il lui faut encore longer quelques dunes, traverser plusieurs oueds, ces rivières asséchées. Enfin, la frêle tente se dresse, un amas de couvertures et de tissus, maigre protection contre les intempéries. Mohammed s’est installé là avec sa femme et ses cinq enfants. Ici, il a trouvé de l’herbe pour faire paître ses troupeaux, ses treize chameaux et sa dizaine de chèvres. C’est tout ce qu’il possède avec sa moto, mais aussi une belle poignée de météorites. Pourtant, quand Yahiya arrive, un autre marchand est déjà passé par là. Il a acheté la chondrite carbonée 450 dirhams [42 euros]. C’est la règle ici. Il faut être le premier. Philosophe, Yahiya le sait bien : « Les météorites, c’est surtout de la chance et souvent tu ne trouves rien. »

La fortune tombée du ciel

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